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Atelier sur le développement des Zones Economiques Spéciales (ZES) en Afrique : Cadre général et orientation principale.

Le 19 décembre 2019, la salle Evala de l’Hôtel du 2 Février a abrité un atelier régional sur le développement des Zones Economiques Spéciales (ZES) en Afrique.

Placé sous le Haut parrainage du Ministère du Commerce, de l’Industrie, du Développement du Secteur Privé et de la Promotion de la Consommation Locale, il est organisé par TOGO INVEST CORPORATION SA et la Société d’Administration de la Zone Franche en partenariat avec Africa Free Zone Organisation (AFZO) qui est une organisation non gouvernementale regroupant les sociétés de Zone Franche et les Zones Economiques en Afrique ; celle-ci a pour mission fondamentale le développement, la gestion et la promotion des Zones Economiques et des Zones Franches en Afrique.

Les participants à cet important rendez-vous sont venus des pays comme le Gabon, le Sénégal, le Cameroun, la Côte d’Ivoire, le Maroc et le Togo dont les représentants proviennent de la Présidence de la République, de la Primature, des Ministères, des Universités de Lomé et Kara, du secteur privé etc. Les experts quant à eux sont issus de la Banque Mondiale, de la Banque Africaine de Développement, de l’ONUDI, de l’AFZO, et du cabinet du Premier Ministre sénégalais.

La cérémonie d’ouverture a été marquée par le mot de bienvenue du Directeur Général de TOGO INVEST, Monsieur Ekué MIVEDOR, le mot de circonstance du Secrétaire Général de l’AFZO, Monsieur AHMED BENNIS et le discours d’ouverture du Ministère du Commerce, de l’Industrie, du Développement du Secteur Privé et de la Promotion de la Consommation Locale, Monsieur ADEDZE.

Celui-ci a mis l’accent sur l’importance de cet atelier pour le Togo en raison de son lien étroit avec le PND 2018-2022. Puis, il a indiqué que pour promouvoir et capturer des investissements, le Togo voudrait au titre de l’Axe2 de son PND s’appuyer sur les Zones Economiques Spéciales en vue de la promotion du développement industriel et de la transformation structurelle de l’économie nationale, par une croissance forte, durable, inclusive, créatrice d’emploi et induisant l’amélioration du bien-être social. Selon lui, les modules qui seront développés par les experts de l’atelier permettront aux participants de mieux saisir les enjeux liés à la conception et à la mise en œuvre d’une Zone Economique Spéciale.

Les travaux proprement dits de l’atelier ont donc commencé. Ils ont fait l’objet de plusieurs présentations suivies de débat.

La première présentation est intitulée quel cadre pour le développement des Zones Economiques Spéciales en Afrique.

Le fait marquant de cette communication assurée par M. MOUBARACK LO, Directeur Général du Bureau de prospective économique du Sénégal, c’est qu’elle a mis d’emblée en évidence que les ZES offrent aux pays africains la possibilité de réaliser des îlots de compétitivité globale et des « Quick Wins ». Cet outil peut permettre d’insérer les pays africains dans des chaînes de valeurs africaines et mondiales. Puis l’orateur a mis en exergue douze clés du succès des ZES :

– L’inclusion de la politique du développement des ZES dans le PND ;
– Une bonne planification spatiale des ZES ;
– Une bonne préparation des ressources humaines ;
– Le développement des infrastructures au sein et en dehors des ZES ;
– Le maintien d’un bon équilibre dans le financement des infrastructures des ZES ;
– La définition d’un bon cadre réglementaire et fiscal de promotion des ZES ;
– La mise en place d’administrations des ZES efficaces ;
– La mise en place d’une coordination de qualité entre les acteurs directs et indirects des ZES ;
– L’accélération de l’amélioration du cadre général des affaires dans le pays ;
– L’encouragement des entreprises installées dans les ZES à créer des co-entreprises (joint-ventures) et des liens de sous-traitance ;
– L’inclusion dans les politiques de développement des ZES d’actions contribuant aux objectifs nationaux de développement autres qu’économiques ;
– L’institutionnalisation d’un bon système de suivi-évaluation des performances et des impacts des ZES.

La communication qui a suivi a porté sur le projet sur l’amélioration de l’environnement des affaires et de l’investissement en Afrique de l’Ouest. Cette présentation a été faite par Monsieur CRAIG, spécialiste principal du secteur privé à la Banque Mondiale.

Les PowerPoints majeurs de la communication de Monsieur CRAIG concernent la vision pour le TOGO en matière de ZES en termes de perspective avec la création d’agropoles, et les principales caractéristiques des ZES modernes, les impacts économiques et sociaux de la mise en œuvre d’un cadre de ZES au Togo, les normes internationales des ZES avec les meilleures pratiques, et enfin la présentation des dispositions clés du projet de loi de ZES au Togo.

S’agissant des questions de financement, une communication a été faite par M. SERRES, expert de l’ONUDI qui dans son exposé a présenté les différentes étapes de développement des ZES et parcs industriels à savoir le diagnostic, la conception des politiques et la planification, la mise en œuvre et le financement, l’exploitation et le financement, la promotion et le marketing. Puis il a précisé que l’ONUDI a élaboré un certain nombre de documents de stratégie sur le cycle de développement des ZES, qui sont disponibles sur le site de cette organisation.

L’orateur a aussi fait remarquer que le financement des ZES doit prendre en compte les choix économiques du pays tels que les questions foncières, les services publics, la pertinence et le nombre de ZES à créer dans le pays. Enfin, il a passé en revue les modèles de financement tels que le Partenariat Public Privé (PPP) qui présente plus d’avantages que le financement public. Par ailleurs, les pays ont la possibilité de pouvoir bénéficier des aides financières des institutions internationales de développement pour la réalisation des études de faisabilité ou pour le développement des infrastructures.

Au tour de Mme ZANGAR LABIDI, Directeur de la Division du développement industriel de la BAD, de faire une présentation sur les Zones Economiques Spéciales en Afrique.

Après avoir présenté brièvement la BAD, elle a fait un focus sur les programmes d’industrialisation de cet organisme :

– Encourager les politiques industrielles probantes ;
– Attirer et canaliser des financements vers des projets d’infrastructure et industriels ;
– Développer des marchés de capitaux liquides et efficaces ;
– Promouvoir et stimuler le développement des entreprises ;
– Promouvoir des partenariats stratégiques en Afrique ;
– Créer des grappes industrielles puissantes sur tout le continent.

Après cette présentation, les participants ont eu droit à un panel conclusif animé par le Secrétaire de l’AFZO, le Directeur Général de la SAZOF, le représentant de la Cellule Présidentielle pour l’Exécution et le Suivi des Projets (CPES), le Directeur Général de l’Agence de Promotion des investissements du Gabon etc. Ce panel a permis aux experts de revenir sur certains aspects des discussions tels que le choix du type des ZES (spécialisées ou multisectorielles) sur la base de l’étude de faisabilité à réaliser, la capacité du pays et les sources de financement, les avantages comparatifs et le contexte local, la mise en place d’un bon cadre législatif des ZES, la bonne gouvernance dans l’atteinte des objectifs, l’importance du choix du partenaire pour l’aménagement et le développement de la zone.

Au nombre des recommandations, on peut noter :

– La mise en place d’un cadre législatif et institutionnel des ZES, qui doit être souple, en lien avec la stratégie du développement du pays et la politique industrielle avec une indication claire des objectifs et des critères d’intégration, des rôles, droits et obligations des différents acteurs de la zone, de la fonction d’administration et celle de régulation, etc. ;
– La création d’une structure ayant pour rôle la planification et l’administration des ZES, ainsi que la gestion des incitations ;
– Le développement des Zones économiques intégrées (Zone d’exportation, parcs industriels, agropoles) visant à favoriser l’industrialisation et la transformation agricole réparties sur tout le territoire.

L’atelier sur le développement des Zones Economiques Spéciales (ZES) en Afrique, a pris fin vers 19 heures. On pouvait lire sur les regards des participants une impression d’édification sur ce sujet en même temps qu’une prudence concernant les choix stratégiques à opérer.

Commentaire
A l’issue de cette journée de réflexion sur l’atelier régional sur le développement des Zones Economiques Spéciales (ZES) en Afrique, on a l’impression que deux thèses se sont partagées le paysage des échanges : d’une part, celle défendue par M. SERRES qu’on peut résumer ainsi : « les études de préfaisabilité et de faisabilité, toutes ces études, et rien que ces études » avant de s’aventurer dans l’univers incertain des ZES, d’autre part, celle de M. AHMED BENNIS pour qui, il ne faut pas s’attarder sur les études de faisabilité et rater des opportunités qui se présentent.

Ces deux thèses, apparemment contradictoires sont plutôt complémentaires à nos yeux dans la mesure où, entre les deux, il y a de l’espace à prendre.

C’est pourquoi, pour résumer il faudra faire, en temps opportun, des études de faisabilité qui conviennent sur la base d’une revue documentaire existante avec des données probantes en même temps qu’il ne faut pas rater les opportunités.

Une étude de faisabilité sur les ZES au Togo doit comporter plusieurs phases et séquençages avec la prise en compte de la durée, du coût et des limites inhérentes à ce travail…

La Chine, qui s’est prodigieusement développée à partir des ZES, la Chine de DENG XIAO PING n’a pas fait d’étude de faisabilité. Mais, elle a été guidée par la formule aujourd’hui célèbre : « Peu importe la couleur du chat, l’essentiel c’est qu’il attrape des souris ».

Au total, il n’y a pas de panacée en pareille matière, et comme disait l’écrivain espagnol ANTONIO MACHADO : « caminante, caminante, no hay camino. El camino se hace al andar » (« voyageur, voyageur, il n’y a pas de chemin. Le chemin se fait en marchant »).

Elliott Anani SITTI,
Directeur Exécutif de l’ASOZOF.